4 et 5 et 6^ème jour de traversée

Les jours et les nuits se ressemblent. Les enfants sont incroyablement patients et ne demandent pas une fois : «  Mais quand est-ce qu’on arriiiiive ? » Ils jouent toute la journée, des fois on ne sait même pas trop à quoi…

Au 4^ème jour de traversée la houle se fait un peu plus grosse et je commence à avoir moins envie d’aller cuisiner. A que cela ne tienne, nous avons François qui donne un sacré coup de main et qui nous sort de bons petits plats de là en bas. Je commence tous les repas par un paaaas faim et fini par me servir une deuxième fois car c’est très bon !

4^ème jour aussi ou j’en ai un peu marre. Matan me regarde et conclut : » il est temps que cela se termine… » Il a raison, pendant 24 heures j’en ai marre. Le bateau bouge plus, j’ai mal dormi et je rêve des sapins en Alsace et d’une bonne bière en compagnie de mes parents autour d’un feu qui crépite !

5^ème jour, le soleil est là, une ou peut-être plusieurs bandes de dauphins viennent jouer avec Nomad et nous accompagnent à 10 -15 pendant plus d’une heure. Ils sautent, plongent sous le bateau, se bousculent et nous tirent des ooooh et des aaah à n’en plus finir. Nous commençons presque à les reconnaître. Celui qui a des points blancs, celui qui a au grand désespoir des enfants la nageoire dorsale entaillée, celui qui est plus petit, etc…C’est beau ! Le moral du coup remonte en flèche et tout l’équipage est émerveillé.

Vous vous demandez peut-être à quoi ça ressemble de traverser un petit bout d’océan avec son bateau sur lequel vous transportez votre vie. Vos trois enfants et votre mari chéri. Et bien c’est une sacré chose. Des fois on se sent complètement inconscient, souvent on se sent les rois du monde si grands et en même temps si petits face à cette immensité qui nous entoure. Quand le vent forcit et que les vagues montent on se met à scruter avec intensité l’horizon en se demandant si finalement ça ne vaudrait pas quand même la peine de faire une petite prière à un dieu ou à une déesse quelconque, juste au cas ou ça fonctionnerait pour apaiser tout ce va et vient de vagues et de vents…

Très très loin tout autour en un immense cercle il y a des nuages qui se dessinent en milliers d’animaux fantasques, de formes bizarres qui se modèlent au rythme de notre imaginaire et se colorent de rouge feu, de rose, d’orange, de gris de toutes variantes. C’est incroyablement beau ! Et quand Matan a la bonne idée de passer Pink Floyd a fond les ballons alors qu’on est allongé et occupé à s’en mettre plein les yeux de tout ces beaux nuages alors ça devient un voyage en soit. Je crois bien qu’à un moment je suis devenue nuage et c’est quelquechose de s’envoler tout là haut…

6^ème jour et on se dit chouette on est presque arrivé, dommage on est presque arrivé… Le capitaine pourrait mettre directement cap sur les caraïbes et voguer encore quelques semaines. Il est dans son élément, mais est ce vraiment la peine de le ressouligner… J

Les calculs se font et Zut nous n’éviterons pas le sale temps et reZut nous arriverons de nuit au port. Contre toute attente, Madame la Houle qui nous accompagne depuis le début se calme un peu. Vous connaissez Madame la Houle ? C’est une dame qui peut être fort corpulente, et qui à chaque inspiration vous soulève de quelques mètres pour vous faire redescendre tout aussi vite. En haaaaaaaauuuuut , en baaaaaaaaas, en haaaauuuuuuuut, en baaaaaaas et comme toute être éternel sa respiration lente et profonde n’est pas prête de s’éteindre. Madame la Houle a les hanches larges et vous fait onduler sur sa croupe qui danse et danse a vous faire tourner la tête, a vous faire verdir parfois. Les vagues du vent aime à la rejoindre les jours ou cha choufffle et alors pauvre petits êtres que nous sommes nous nous retrouvons ballotés dans toutes directions, en haaaaaauuuut en baaaaas et en même temps à droite sec et à gauche sec. Car mesdemoiselles les vagues du vent, elles n’ont pas le souffle lent, elles sont impatientes, agités et se cassent rapidement. C’est toute une histoire en soit, à en regretter par moment de ne pas avoir pris plus de cours de danse…

21h00 les enfants dorment. Ouf ! une chose de moins à gérer. Nous regardons la carte et après moultes hésitations décidons de tenter la passe entre Lanzarotte et l’île de la Gracieuse. Le vent souffle à 20 nœuds et nous sommes secoués de tous côtés. Tenter la passe s’est s’attendre à des vents à 25 nœuds et ne pas savoir à quelle sauce les vagues vont nous manger… On se dit à ce moment que beaucoup d’expressions viennent du monde marin. « Etre dans une mauvaise passe….. » Vogue le vent, roule la vague, on tentera le tout pour le tout en nous disant que si c’est vraiment trop l’horreur nous sortirons de l’autre côté et naviguerons les deux prochains jours jusqu’à une île plus lointaine. Personne de nous en a envie car la mer va continuer de grandir et les vents de forcir. Mais par moment il n’y a pas le choix….

François, Matan et moi sommes dehors. Les gilets bien attachés et nous alternons coups d’œil sur la force du vent, l’état de la mer et trajectoire pour arriver comme il faut dans la passe. On se rapproche, on se rapproche, ça y est on y est. Le vent monte un peu, pas tant que ça, les vagues …se calment. Merci dieux et déesses ou amie chance. Nous nous approchons de l’entrée du port, il faudra se mettre en travers du vent pour entrer et espérerer que les courants dans le port ne soit pas trop forts et face à nous. On entre, on ne voit pas grand-chose…

Nous nous sommes dit, nous nous amarrerons à la première place venue et changerons demain. Problème, nous ne voyons AUCUNE place…. Je fouille entre les bateaux avec la lampe de poche, le capitaine commence à s’impatienter… et nous voyons au loin un garde du port qui nous fait signe. Ouf ! nous nous approchons et je l’entends me hurler. Autorisatioooonne, autorisatiooooone . Avez-vous l’autorisation de venir ? Pour s’amarrer à la Gracieuse il faut une autorisation. Nous le savions bien sûr mais vu l’état de la mer, nous en moquions royalement. Je hurle en retour au garde, dans mon meilleur espagnol un : NO COMPRENDOOOO, NO COMPRENDOOOO, necessitamos une place et pronto ! Non mais… va pas nous enquiquinner celui la avec son autorisationnne…. De guerre lasse, il nous indique un endroit et s’avère finalement être très sympa. 10 minutes plus tard notre traversée de 6 jours est terminée, Nomad est amarré, 3 enfants dorment et 3 adultes exultent de joie autour d’une bonne bière. Pas de sapins d’Alsace, pas de feu de bois, mais un bonheur brut intense et beaucoup de fierté de l’avoir fait ! Nous sommes arrivés. YOUUUUUUPIIIIIIIIIE !!!!!!

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Pour la petite histoire rigolote :

Nous allons nous coucher heureux comme des papes en nous réjouissons d’une nuit sans gite sans stress. Vaguement avant de m’endormir du tréfond de mon cerveau s’allume une petite lumière qui me dit…. Atlantique, marée…… mais tout aussi vite la lumière s’éteint et je sombre comme Matan et François dans un profond sommeil. 4heure du matin les enfants s’agitent dans leur sommeil. Je pars voir et constate avec grande surprise que Noa est complètement affalée sur Adi qui elle-même est complètement coincée contre la paroi du bateau. Au même moment Matan s’affole d’un bruit d’amarre pour le moins surprenant. Nous sortons à toute hâte pour constater que nous sommes suspendus par nos amarres au quai. Bande de nuls que nous sommes, ou peut-être bande de trop fatigués…. Nous avions omis un tout petit détail. Ici il y a des marées….. Arrivés à marée haute nous avions régler nos amarres en fonction. Là 3 heures plus tard la marée est en train de descendre et nous sommes déjà plus de 1 mètres plus bas…. On descendra encore d’un mètre… A toute vitesse nous défaisons nos amarres en nous félicitants de ne pas avoir fait de nœuds impossibles à détacher ET d’avoir utilisé nos plus longues amarres et quelques instants plus tards flottons à nouveau sur l’eau à la verticale J Ouf…

Autre bonne nouvelle, le port dans lequel toutes les places sont réservées par des bateaux de régates sensés arrivés dans la journée nous fera cadeau d’un petit désistement et nous offrira un abri pour encore plusieurs jours. Chouette et merci. A nous maintenant la découverte de l’île. Une bise salée pour vous et merci de nous suivre et nous lire. Les Nomades contents