Un petit coin d’Afrique poussièreux et pas fort riche…. A peine descendu du bateau, en route pour l’immigration et la douane, un jeune homme s’approche et se joint très naturellement à nous pour papoter. Il a l’air sympa et nous marchons ensemble direction douane. Après 10 minutes nous lui demandons ou il va et il nous répond que lui aussi va à la douane. Il nous suit de près sans nous lâcher jusqu’à ce qu’on comprenne enfin… qu’il a beau être fort sympathique mais qu’il est surtout là pour nous proposer ses services de guide….

Shefqet très gentillement et fermement lui dit qu’on ne veut pas lui faire perdre plus de temps et qu’il a certainement compris que nous ne lui donnerons pas d’argent… Il va falloir que nous nous habituions à cette fermeté car nous nous ferons aborder encore à maintes reprises. Malgré que nous ne nous promenions sans bijou et sans signe apparent de richesse, tout en nous crie ARGENT ARGENT. Nous sommes blancs et touristes sur ce petit coin de terre bien pauvre.

Tout au long de notre séjour nous verrons des groupes de personnes qui ont l’air d’attendre quelquechose, sans faire grand-chose. Ils trainent par-ci par-là et lorsque finalement ils entament une tâche ils sont à 15 pour le faire sans grande efficacité. Notre esprit Suisse s’interroge et se rend compte qu’au Cap Vert il ne faut pas être pressé.

Nous pensions nous ravitailler en fruits et légumes pour la deuxième partie de la traversée mais là encore nous verrons que dans les magasins et les marchés il n’y a pas grand choix….

Mindelo la capitale de Saint Vincent est tristounette avec ses maisons délabrées et ses habitants qui ont parfois des chaussures aux pieds. Au marché on me demandera si je n’ai pas des habits d’enfants à leurs donner. ..

Le marché regorge de babioles construites main et de vieux habits souvent usés, le tout posé en tas. Les légumes et les fruits sont chers et peu variés. Pour nous cet endroit est exotique, différent et on prend la nouveauté comme une expérience riche en dépaysement et en apprentissage pour les enfants. Oui chérie ils sont pauvres… Cela étant nous sommes très heureux de penser que pour nous cet endroit reste un stop sur notre route et pas le pays dans lequel on vivra toute notre vie. Quel chance on a !

De même nous vivons un moment délicat à ce même marché quand Amos compte à voix haute tout l’argent qu’il a dans sa tirelire devant les yeux ébahis du vendeur ….Nous lui expliquerons par la suite que cela ne se fait pas et qu’une grande majorité des cap verdiens n’auront jamais d’argent de poche et pas autant d’argent que lui par semaine voir par mois pour nourrir leur famille…

Malgré ce dénuement, Adi se verra offrir un collier par un vendeur qui s’est laissé attendrir par son explosion de larmes quand elle s’est vue refusée la voiture qu’elle voulait avoir TOUT DE SUIIIITE.

La nourriture est très riche en protéines et les plats sont frites avec œufs, hamburger avec bacon, saucisse, viande de porc, œufs et frites, plat à base de haricots noirs avec ou sans œuf, etc etc… A nouveau c’est dépaysant et même assez bon, mais nous sommes heureux de penser que bientôt nous serons aux Caraïbes et qu’une fois là-bas nous espérons pouvoir faire le plein de légumes et fruits frais !

Nous occupons nos journées à visiter Mindelo, à ravitailler le bateau et à chercher à remplir nos bonbonnes de gaz. Un jour nous ferons une excursion sur l’île de Santo Antao. Un petit paradis pour nous en manque de terre ferme et de belle verdure. Nous partons tôt et prenons le ferry pour rejoindre l’île. En tout il y en a pour une petit heure de trajet. Les personnes s’entassent de partout, et élégament deux jeunes gens me laissent leur siège quand j’arrive avec les enfants. 5 minutes avant le départ, petite anecdote amusante… une dame du staff arrive et distribue des petits sachets roses à tout ceux qui en veulent un ou deux ou trois….

Je suis très étonnée par cette distribution et me demande si c’est par soucis de propreté. Quand le ferry démarre je comprends effarée à quoi servent ces petits sacs de princesse…. Pauuuuuvres cap verdien, ….. ils sont piiiiiires que moi ! le bateau ne bouge pourtant pas … ou peut-être si peu…. Et les sacs se remplissent à grand bruit….

Ok j’arrête, vous aurez compris … ! J mais je penserais à eux mes compagnons d’infortunes quand je serais malade à nouveau sur notre beau Nomad. Je me dirais : » il y a pire que moi ! «  hahaha

Bref nous arrivons à Santo Antao et à peine sorti du ferry nous négocions sec avec un chauffeur taxi pour faire descendre le prix exhorbitant qu’il demande pour nous conduire toute la journée à travers l’île. Nous tombons d’accord sur un tiers du prix demandé et hop montons tous à bord de sa voiture.

Le paysage est magnifique, vert, avec une belle végétation. La route est pavé sur des kilomètres et cela ajoute au charme ambiant. Malheureusement ici aussi nous retrouvons la poussière qui recouvre tout et empêche le soleil de percer….

Notre chauffeur nous conduira au bord du cratère d’un volcan et nous laissera descendre pour que nous en fassions le tour. Des vaches, des chèvres et des ânes nous font des coucous un peu partout sur notre route. Au grand désespoir de Noa, ils sont chaques fois attachés et elle rêve de leur rendre leur liberté… Il y a des sapins aussi…ahhh les sapins, qu’est ce que j’en rêve pendant les traversées. Heureusement qu’Alain m’envoit régulièrement des photos qui m’aident à me ressourcer dans les moments difficiles. Là je les photographient sans discontinuer et je m’en mets plein les yeux et le cœur en prévision de la suite.

Au fond du cratère quelques paysans en train de cultiver la terre et des femmes qui remontent la route avec de grands sacs sur la tête. Tous sont souriants et nous essayons de communiquer à grand renfort de sourires et de hôchements de tête. Une belle rencontre avec cette femme arrêtée au bord du chemin, un fichu bleu serré autour de la tête, un amalgame d’habits mis les uns sur les autres et deux chaussures trouées avec ses orteils dont les orteils dépassent. Elle nous sourit et s’attendrit sur les enfants. Elle nous parle un bon moment et nous explique un tas de choses sur la vie, sur sa vie… Nous ne comprenons rien ou presque mais le langage du cœur parle pour deux et nous nous quittons émus et enrichis. Elle sur son petit bout de terre et nous en route pour la découvrir….

Antao sera aussi cette longue procession de cap verdien en costume portant le cerceuil de l’un des leurs au milieu de la montagne et engueulant notre chauffeur de ne pas être au rendez-vous…. Cette bande d’enfants avec dans les bras une petite voiture construite dans un bout de carton, sans roues. La plus grande porte le bébé et ils restent là le matin, le midi et le soir. Demain ils seront encore au même endroit à regarder passer les touristes. Comme nous l’explique notre chauffeur, ils ne vont pas à l’école… Un voile de tristesse passe et la voiture à nouveau nous emporte, nous les chanceux qui poursuivont notre route.

Antao c’est la pause de midi, en bordure de mer, avec les pêcheurs qui vident les poissons, la mama qui engueule son bonhomme. Aah on a pas envie de la fâcher celle là et on plaint presque son bonhomme de mari pour ce qu’il a fait…

Puis roule petite voiture et nous découvrons toujours sur nos petites routes pavés le plus beau coin de l’île. Une profusion de manguiers, papayers, des canes à sucre en fleur, la rivière qui coule près de petites maisons de pierres. En arrière plan la montagne plus escarpé. Cette partie de l’île est la plus belle, la mieux entretenue.

Puis c’est le retour au ferry ou nous embarquons à nouveau entre passagers et petits sacs roses direction Mindelo, Nomad, notre petite maison flottante à nous, notre petite bulle de douceur et de comfort.

Encore un ou deux jours et nous larguerons à nouveau les amarres pour entamer la deuxième partie de cette transatlantique. Allez ca va aller. Je crois qu’il y a plus infortuné que moi sur cette terre !